Skip to main content

Transfert est né il y a quatre ans. L’échéance de la convention d’occupation temporaire du terrain des anciens abattoirs est prévue pour décembre 2022, laissant place à la construction du futur quartier dans le cadre de la ZAC (zone d’aménagement concerté) Pirmil-Les Isles. La question de ce que laissera Transfert au futur quartier se pose : faut-il rester encore quelques temps, intégrer certaines œuvres, ambiances ou usages au territoire, ou plier bagages ? Un premier temps d’échange s’est tenu le 24 juin dernier avec des voisins·es, des usagers·ères des lieux et des associations.

Transfert est sorti de terre il y a quatre ans sur le terrain des anciens abattoirs de RezéEn décembre 2022, Pick Up Production (porteur du projet Transfert) doit rendre les clés du terrain à Nantes Métropole Aménagement pour laisser place à la construction du futur quartier dans le cadre de la ZAC (zone daménagement concerté) Pirmil-Les-Isles. Plus que jamais l’avenir de Transfert est en question : doit il s’arrêter fin 2022 ? L’expérience peut elle se poursuivre ? Quelle(s) traces pourrait laisser Transfert dans le futur quartier ? Une oeuvre ? Des ambiances ? Certains usages ? Un souvenir ? Un premier temps d’échanges s’est tenu le 24 juin avec des des voisins·es, visiteurs, acteurs de structures intervenantes dans le projet autrement baptisés les usagers de Transfert.

Une quinzaine d’usagers·ères se sont réunis à l’invitation de l’équipe de Pick Up Production le jeudi 24 juin 2021 pour poser les premières idées d’une vaste réflexion collective qui s’étendra sur plusieurs mois. Après une présentation des objectifs de cette première réunion, chaque invité·e a sélectionné une carte du jeu Dixit symbolisant « son Transfert ». L’un·e choisit une lune souriante. Un·e autre brandit un livre ouvert. Josselin, communicant pour La Ressourcerie, pioche l’image d’une théière disposée dans une chambre avec un pirate à jambe de bois : « Un objet qui n’est pas là où on l’attend ». De son côté, Magali sélectionne une femme, bagages en main, le long d’un chemin de fer : « Elle est dans un lieu désert, a priori peu attractif, comme l’était Transfert. Elle arrive, avec ses deux valises, et elle sait qu’elle va changer les choses » souligne avec détermination cette membre de l’association Rezé Seniors. Une autre carte est sélectionnée, représentant une maison qui avance, dotée de bras et jambes : c’est le choix de Maxime, illustrateur, ancien président et actuel secrétaire de Pick Up Production, « bénévole et adhérent avant tout » : « Cela me fait penser à l’univers de Miyazaki. Transfert, c’est un peu comme un château ambulant, à échelle de 15 hectares.

Une fois les présentations faites à travers ce jeu de cartes les participants se répartissent en six ateliers, chaque atelier correspondant à un scénario post-2022. Latelier « L’aventure se poursuit » conçoit une prolongation du projet en lieu et place. « Je trouve intéressant que le site fasse partie de l’ensemble urbain, qu’il reste ici », amorce un représentant de l’association Rezé Seniors. Le mélange des générations lui paraît primordial « pour permettre aux anciens de venir avec leurs enfants, pour créer une coopération entre les uns et les autres ». Pour Josselin « c’est important qu’il y ait une trace physique, que des choses restent, mais surtout, c’est l’esprit qui doit vivre ».

À côté, nombreux·ses sont ceux qui défendent le maintien des structures physiques. « Pour moi, Le Remorqueur, oui ! Il symbolise la Loire, il a du sens. On pourrait en faire un intérieur-extérieur afin d’accueillir des enfants, des associations, des centres socio-culturels, mais aussi des réunions » insiste Elina, qui réfléchit au scénario « Un don aux habitants ». Celui-ci dépeint une passation : la tribu de Transfert quitte les lieux, démonte partiellement la cité, et laisse des éléments aux futurs habitants·es. « Garder Le Remorqueur, ce serait pas mal, s’enthousiasme également Ronan. Il a une histoire Nantaise, il y en a eu des soirées sur ce bateau ».

Le toboggan crâne de vache, présent lui aussi depuis la création de Transfert, séduit à son tour. « Il nous rappelle le passé de ce site désaffecté, avec l’histoire des abattoirs. Il n’aurait plus de sens  s’il était disposé ailleurs » estime une usagère face à l’idée d’un « transfert » de Transfert. Déménager ? Créer un projet semblable ailleurs ? Beaucoup rejettent ce scénario. « Cet endroit est unique. Il constitue une opportunité extraordinaire pour passer d’une époque à une autre. Je ne suis pas sûre qu’on puisse trouver la même chose ailleurs, même en France » interroge une invitée. Pour Lucie, convaincue que Transfert devrait rester en région nantaise, « il faut s’adapter au lieu qui adopte le projet ». L’idée de conserver des éléments physiques à Rezé semble faire l’unanimité. Reste la question de savoir ce qu’on en fait.

« Je pensais plus à des lieux pour de l’éducation populaire, parce que Transfert est ouvert à tout le monde, beaucoup de gens y sont passés. Les gens du voyage sont juste à côté, les habitants voient et entendent ce qui s’y passe et la culture nantaise vient jusqu’ici : « cela mixe beaucoup de publics », analyse Lucie. Comme d’autres, elle s’interroge sur le scénario « L’esprit des nomades ». De Transfert, d’autres lieux de culture pourraient naître dans la future ZAC : « Je pense au jardin partagé, à des épiceries locales, des résidences pour les artistes » complète cette usagère. Pour Josselin de La Ressourcerie , « on peut capitaliser ce qui a été construit en termes d’énergies et de dynamiques. Transfert, c’est un lieu culturel avec des concerts, des expos. Peut être un lieu où on pourrait créer des événements, s’inspirer de ce qui a été fait, avec des résidences artistiques, des arts visuels, de la musique. Un lieu pluriel ».

Un autre scénario interroge : « un îlot Transfert dans le futur quartier » ou comment Pick Up Production s’associerait aux promoteurs pour construire un nouvel espace au sein de la ZAC Pirmil-Les-Isles. Si l’idée réjouit, les inconnus et craintes autour du futur quartier empêchent de se projeter : quels bâtiments seront construits ? Pour quels usages ? Et quels en seront les designs ? « On pourrait installer le serpent à l’entrée du quartier ? Mais il faut que ce soit bien prévu, qu’il se coordonne avec le style architectural » soutient Elina de l’association Rezé Seniors. « Si on confie la tête, à l’entrée, à un urbaniste, il va lever les bras au ciel et dire « comment sécuriser ça ? », soupire Michel. Lisa imagine déjà une symbolique esthétique : « Transfert, c’est beau visuellement : il y a des fresques, des illustrations, beaucoup de couleurs et de matériaux. Un côté atypique. J’aimerais que le quartier soit aussi coloré, que le projet propulse les choix architecturaux ».

Peu de monde se hâte pour participer au scénario n°6, « Au revoir et merci ». Sarah, elle, se veut catégorique : « Je suis allée directement là où c’est tranché, un scénario pour lequel je suis défavorable et où je n’ai aucun argument pour. C’est plus facile ». Cette usagère réfléchit aux autres possibles : « Transfert fait partie de l’histoire du quartier. Elle est très contemporaine, certes, mais il y aura un travail de mémoire à faire, il faut incarner cet esprit dans un espace physique. Mais je sais bien que la promotion immobilière a un autre poids et d’autres évidences ». 

Cette première réunion des usagers se termine par un bilan collectif où les participants échangent quelques  curiosités et d’autres perspectives ; puis place à une photo de groupe et au verre de l’amitié

Prochain rendez-vous du Collège des usagers le jeudi 30 septembre 2021 à 18h15 à Transfert.

Pour s’inscrire : bastien@pickup-prod.com

Article rédigé pour Transfert par Emma Rodot et Pierre-François Caillaud (Rédactrice et rédacteur en chef de Grabuge Magazine)

Crédits photo : Charlyne Labarre